J'ai eu la chance de voir ce film qui a été un choc immense pour moi, quoique exactement l'expression de ce que j'en attendais. Nadine Labaki, la réalisatrice de ce chef-d'oeuvre, outre une beauté physique hors du commun, s'avère être une actrice d'exception mais aussi une femme d'une sensibilité émotionnelle sans pareil ainsi qu'une rare intelligence dans le regard qu'elle porte sur le monde, les hommes, l'amour, les valeurs morales, la fidélité conjugale mais aussi ce que seuls les spectateurs avertis et amoureux de cette partie du monde peuvent comprendre, un hommage fabuleux à ce pays exceptionnel qu'est le Liban.
Ces quelques femmes qui ne font rien d'autre que vivre leur quotidien ne sont ni des actrices ni des comédiennes, elles sont des femmes tout simplement mais avec une particularité de taille, la lettre "F" en majuscule qui précède le mot "femme".
Cette réalisation est donc celle d'une femme qui parle aux femmes d'un sujet de femmes mais je suis assez persuadé qu'un homme qui entre dans la salle obscure avec un oeil aussi humble que respectueux, en ressortira avec en lui un bouleversement interieur à mi-chemin entre bien-être, apaisement, sentiment de pleinitude mais aussi le regard rivé au ras du sol tant cette oeuvre met en évidence l'infinie supériorité du sexe dit faible sur la gente masculine. Quelle belle leçon devons-nous accepter de recevoir, nous les hommes orgueilleux et souvent stupides de ne pas admettre qu'un monde dirigé par les femmes serait un monde d'amour.
J'ajouterai enfin qu'un point essentiel m'a troublé. Le même sujet traité par un homme, l'aurait été de manière totalement différente. Le fantasme suprême et obsédant du rideau des instituts de beauté, derrière lequel se vit l'intimité la plus secrète de nos femmes est enfin entrouvert par la main délicate de l'une d'entre elles. Un homme aurait saisi cette occasion pour nous livrer des plans visuels très réalistes et des dialogues débridés, libres de toute retenue. Nadine Labaki au contraire, nous laisse pénétrer ce lieu qui s'offre à nos regards masculins avec une immense pudeur mais pourtant, et c'est bien là l'essence même du film, une sensualité presque érotique qui nous laisse deviner ce qu'elle a fait le choix de ne pas nous montrer. Pour un homme qui fait l'effort de laisser agir cet imaginaire qui nous fait tant défaut d'ordinaire, je peux vous assurer que c'est bien là mille fois plus troublant que des plans de caméra glissant sur des décolletés et autres partie de la merveilleuse anatomime féminine que nous ne savons plus faire l'effort d'imaginer sans la visualiser concrètement.
Le contraste saisissant entre la réalité des rues de Beyrouth, aussi souillées que poussiéreuses, odorantes, bruyantes et menaçantes, avec la grâce de ces belles qui semblent superposées dans ce décor est surréaliste. On a réellement l'impression que le décor est la réalistation des hommes alors que les femmes y évoluent simplement, sans qu'on n'ai eu la délicatesse de créer un cadre plus digne de leur splendeur.
Il y a de toute évidence un "avant" Caramel et un "après" mais pour ma part, deux jours après l'avoir visionné, je suis encore "dedans"... Mx69