Dor biha ya chibani, Sidi hbibi, Ya qalbi khalli el hal, Mahani ezzine........ Un vrai regal pour les puristes!
Shlomo ou Simon Halali, dit Salim Halali, est né à Bône (Annaba) en Algérie le 30 juillet 1920, d'une modeste famille de boulangers Juifs, originaire de Souk Ahras, berceau d'une des plus grandes tribus Chaouia, les Hilali. Son père est d’origine turque et sa mère (Chalbia) une judéo-berbère d'Algèrie. A quatorze ans, il quitte ses parents et débarque à Marseille en mars 1934 d'un bateau "moutonnier". A l'occasion de l'exposition universelle de 1937, il monte à Paris pour y débuter une carrière de chanteur de charme espagnol. C'est sa rencontre avec les chanteurs Mahieddine Bachtarzi et Mohamed El Kamal qui marquera le début d'une carrière fabuleuse de chanteur oriental. Ils l'intègrent à la troupe "El Moutribia", fondée par le grand Edmond Yafil, pour une grande tournée dans les capitales européennes. C'est à Paris qu'il rencontre Mohammed Iguerbouchen, fondateur du Cabaret "Al Jazaïr", rue de la Huchette, et génie de la musique, qui lui composa des morceaux à sa mesure. Son étoile ne cessa de briller depuis. Ses disques connaissent des ventes record et deviennent, dans l'effervescence des années quarante, "la coqueluche des radios d'Alger, Tunis, Rabat et Tanger qui passaient, en boucle, ses chansons…". En 1940, Salim Hilali échappe à la déportation grâce à l'intervention de Si Qaddour Benghabrit - Ministre plénipotentiaire au Maroc sous le protectorat et premier recteur de la grande mosquée de Paris, inaugurée en 1926 par Moulay Youssef et dont le premier appel à la prière fut lancé par la voix du ténor Mahieddine Bachtarzi - qui lui délivre une attestation de conversion à l'islam au nom de son père et qui pour corroborer cela, fait graver le nom de ce dernier sur une tombe abandonnée du cimetière musulman de Bobigny. Sauvé des fours crématoires nazis, le recteur l'engage au café maure de la mosquée où il s'est produit en compagnie de grands artistes tels Ali Sriti et Ibrahim Salah. Qaddour Benghabrit est certes un "Alem", docteur en foi, mais aussi un grand mélomane. En tant que luthiste et violoniste, feu Mohammed V le désigna membre de la délégation marocaine au congrès de la musique arabe du Caire de 1932. En 1947, Salim Halali crée à Paris le cabaret oriental "Ismaïlia Folies" dans un hôtel particulier qui appartenait à Ferdinand Lesseps (ingénieur du canal de Suez), situé dans la prestigieuse avenue Montaigne. En 1948, il en crée un second, "Le Sérail", rue du Colisée. Au sommet de sa carrière, il choisit de vivre au Maroc où il est accueilli par les grandes familles. Il y installe, en 1949, dans l'ancienne Médina de Casablanca, le fameux "Coq d'Or", l'un des plus prestigieux music-hall oriental au monde où se sont produits les plus grands artistes (Fouiteh, Hajja Hamdaouia, Maâti Belkacem, Line Monty, Blond Blond, Lili Boniche, Safia Rochdi, Latifa Amal, Warda El Jazaïria, Raoul Journo….). Ce fut l'époque de la convivialité et de la symbiose judéo-arabe, évoquées, avec nostalgie, par Mohamed Maradji dans son livre "Salam Shalom", publié dans les années soixante-dix. En 1965, il quitte le Maroc pour s'installer à Cannes dans une magnifique villa "Villa Sanit Charles" où il vit entouré d'oeuvres d'art et de bibelots rares. En 1970, il entreprend une deuxième carrière, cette fois en français, avec une musique qui reste néanmoins très influencée par la musique arabe. C'est la première fois qu'un chanteur oriental tente de faire carrière en Europe. La parution d'un disque chez Polydor en 1970 fut suivie par un grand gala dans une salle inhabituelle pour la musique de variétés : "la salle Pleyel", réservée d'ordinaire aux divas et autres grands interprètes de musique classique. La salle était comble le soir de cette première internationale mais le public habituel de Salim, qui lui faisait fête, le tira insensiblement vers ses grands succès de la musique arabe. Le lendemain, la presse unanime ne tarissait pas d'éloges sur la nouvelle étoile que le monde occidental venait de découvrir. Les radios et la télévision firent le siège de l'artiste pour obtenir une interview ou pour l'intégrer dans leurs grandes émissions. Fuyant la vie médiatique et trépidante, Salim préféra se retirer, une deuxième fois, à Cannes pour se consacrer à sa passion d'antiquaire. Il avait consacré près de quarante ans à la musique maghrébine qu'il avait servie avec tout son talent, suscitant des vocations et une multitude d'imitateurs qui ne se cachaient pas pour lui emprunter un style qui a marqué toute une génération ou puiser allègrement dans son répertoire. Depuis les années 1970, il n'a jamais cessé d'enregistrer des chansons, dépensant des sommes colossales pour monter d'abord un studio à Cannes et ensuite un autre à Paris, pour son plaisir personnel. Il y passait des nuits entières et y conviait les meilleurs musiciens arabes et espagnols. Mieux encore, le "métier" aidant, sa voix et son art se sont affirmés, apportant à son interprétation une souplesse et une sûreté infinies et faisant de lui un artiste inégalable. En dehors de ses activités d'antiquaire, où il a montré un goût sûr et délicat, il n'a jamais refusé de faire des galas sur la Côte d'Azur, à Paris, au Maroc, à Montréal. Sa spécialité était l'animation des mariages des grandes familles du monde arabe : le roi du Maroc qui avait pour lui la plus grande admiration l'a convié au mariage de sa fille aînée, lui faisant un pont d'or. Il parait que cheb Khaled est allé le voir, accompagné de son impresario, pour lui acheter les droits de l'une de ses chansons. Il eut cette réponse, "Tu mets le prix que tu veux. Une fois fixé, tu le divises en deux. 50% pour les orphelins des musiciens algériens et le reste pour le centre où je finis mes jours. Moi je ne veux pas d’argent." Interloqué par une telle seigneuriale offre, à laquelle il ne s'attendait pas, le roi du Raï fut très, très généreux… "Parler de Salim Halali, c'est exactement comme parler de la diva Oum Kelthoum. Ce n'est pas la chanson qui compte, mais le chanteur, sa voix, sa prestance, sa manière d'enfiévrer son monde…". Disait un de ses fervents admirateurs… Ainsi fut Salim Halali. Un artiste total, esthète, décalé, hédoniste, festif, libertin, polyglotte, humaniste et universel qui brassait des fortunes. Ce cosmopolite aux identités multiples, a fini ses jours, le 25 juillet 2005, à 85 ans, loin des siens, dans l’anonymat à la maison de retraite "Sant Roch" à Vallauris dans la région niçoise (il faut souligner que Salim Halali, au crépuscule de sa vie, souhaitait l'anonymat et dissuadait toute personne de l'approcher). Incinéré, suite à son souhait testamentaire, ses cendres seront-elles accueillies, en offrande, par la mer Méditerranée qu'il a tant célébré et chanté ? "Je suis, croyez- moi, Méditerranéen. Je le suis dans la voix, je le suis dans l’amour, je le serai toujours…". "Moi, je suis d'un pays et d'une race étrange. Je n’ai pas d'horizons, de frontières à mon cœur Le chant d'une guitare et puis mon âme change. Je n'ai plus de parents. Ici je n'ai que des frères et des sœurs de cœur… Mon pays c'est l'amour et j'aime avec outrance les enfants des faubourgs…". Article tiré essentiellement de : MOHAMED AMESKANE - La gazette du Maroc. L'existence de Salim Halali, l'enfant d'Annaba, est passée inaperçue du grand public algérien. Dépositaire d'un riche répertoire musical maghrébin, certains de ses refrains sont encore de nos jours fredonnées, telles que : "Mahani ezzine ya laâmor", "Mine el barah oua liyoum", "El âïn ezzarga", "Sidi h'bibi", "Dour biha ya chibani","Rimoun rametni", "Ahna jinak", "Ya qalbi khalli el hal yamchi âla halou", "Sbert mazal nesber" et bien d'autres succès.... Annoncer au moins sa disparition dans les médias algériens aurait été un hommage rendu à titre.
batata
Nombre de messages : 689 Date d'inscription : 20/06/2007